J’ai décidé que je devais me rendre là où nos hommes sont allés dans des conditions bien plus terribles, et je suis très fière d’avoir pu, même de façon modeste, souligner le courage de mes compatriotes.
– Mary Riter Hamilton
Le nouveau timbre de Postes Canada illustre l’œuvre intitulée Trenches on the Somme (1919) d’une femme dont le talent n’avait d’égal que sa détermination farouche. Mary Riter Hamilton est, à titre officieux, la première artiste canadienne de champs de bataille.
Née à Teeswater, en Ontario en 1867, Mary Riter Hamilton est touchée par plusieurs tragédies au début de la vingtaine, dont celle de devenir veuve. Ce sont toutefois ces mêmes épreuves qui lui donnent vraisemblablement la force, la détermination, l’indépendance et l’instinct de survie dont elle aura besoin plus tard. À Winnipeg, elle ouvre un studio de peinture sur porcelaine qui devient populaire auprès des femmes avant de se rendre à Berlin et à Paris pour étudier la peinture. À son retour, elle expose ses œuvres dans plusieurs villes canadiennes, encensée par la critique. En 1912, elle déménage à Victoria où elle devient une artiste réputée.
Pendant la Première Guerre mondiale, sa demande au Fonds de souvenirs de guerre canadiens de rejoindre le front en tant qu’artiste de guerre est refusée en raison de son sexe. Déterminée, Mary Riter Hamilton trouve en 1919, l’année suivant la fin des hostilités, une autre façon de gagner les champs de bataille maintenant silencieux. Elle obtient une commande de l’Amputation Club of British Columbia (aujourd’hui Les Amputés de guerre) pour illustrer les ravages de la guerre dans une publication réservée aux membres.
Maintenant dans la cinquantaine, elle quitte le confort de sa demeure à Victoria pour voyager seule en France et en Belgique, et dresse son chevalet au milieu des champs de bataille détruits par la guerre. Sans le statut officiel ou le revenu offert aux artistes masculins du Fonds de souvenirs, elle vit dans une hutte en tôle érigée par le Corps de travailleurs chinois. Elle peint dehors, entourée d’obus d’artillerie non explosés et de tranchées qui s’effondrent. Elle survit même à une attaque de chasseurs de primes. Elle réalise plus de 300 peintures illustrant les paysages d’Amiens, de la Somme, d’Ypres, de Passchendaele et de la crête de Vimy. Sa difficile odyssée se déroule dans de rudes conditions et dure deux ans et demi.
Après sa maigre allocation de la première année, elle survit avec l’argent qu’elle gagne en vendant au pays quelques tableaux. Son travail terminé, Mary Riter Hamilton aboutit à Paris, mais n’a pas assez d’argent pour payer son retour au Canada. Encore une fois, elle fait preuve d’esprit d’initiative et d’audace en peignant des foulards en soie qu’elle vend à des clientes parisiennes à la mode. En plus de payer son billet de retour, ses foulards colorés lui valent une médaille d’or lors de l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes à Paris en 1925.
À son retour au Canada, le Musée des beaux-arts du Canada rejette ses peintures. Dans l’espoir probable de donner un sens aux épreuves qu’elle a endurées, Mary Riter Hamilton fait don de plus de 200 de ses œuvres aux Archives nationales (aujourd’hui Bibliothèque et Archives Canada) qui témoigneront, pour toujours, de la dévastation causée par la Grande Guerre.
Malheureusement, Mary Riter Hamilton a une santé chancelante et vit dans la pauvreté le reste de ses jours. Elle ne recommence jamais vraiment à peindre. Il faut attendre des décennies après son décès dans un hôpital psychiatrique en Colombie-Britannique en 1954 pour que le monde des arts commence à apprécier l’héritage incroyable de cette artiste audacieuse et avant-gardiste.
Timbre dédié à Mary Riter Hamilton, première artiste de guerre à titre officieux au pays
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