Le dernier joueur encore en vie d’une équipe de baseball nippo-canadienne de légende dévoile le timbre célébrant les Vancouver Asahi
Lorsqu’on a présenté les membres restants des Vancouver Asahi pendant le souper d’intronisation au Temple de la renommée du baseball canadien en 2003, la foule s’est levée et a applaudi les cinq aînés canadiens d’origine japonaise pendant de longues minutes. Cet accueil chaleureux a ému les anciens joueurs aux larmes.
Seize ans plus tard, Kaye Kaminishi, dernier membre de l’équipe initiale des Asahi encore en vie, dévoile le plus récent timbre de Postes Canada au Musée national et centre culturel Nikkei de Burnaby, en Colombie-Britannique. Le timbre rend hommage à la célèbre équipe qui a laissé sa marque sur le baseball en Amérique du Nord et donné de l’espoir aux Canadiens d’origine japonaise.
Une photo de Kaye Kaminishi (rangée arrière, deuxième à partir de la gauche) et de ses 10 coéquipiers en 1940 orne le timbre en forme de balle de baseball. Le jeune joueur figure aussi sur la couverture du carnet.
Même si M. Kaminishi est maintenant âgé de 97 ans, on pouvait facilement le reconnaître sur l’agrandissement présenté lors du lancement du timbre.
Les Asahi ont gagné plusieurs championnats de baseball grâce à leur brain ball
L’équipe de baseball amateur des Vancouver Asahi était composée de joueurs nippo-canadiens qui ont fait les manchettes en adoptant un style de jeu unique qualifié de brain ball (jeu astucieux). La stratégie a été mise au point par Harry Miyasaki, un nettoyeur de la rue Powell, qui rêvait de former une équipe capable de battre d’autres clubs canadiens de la ville.
Sa stratégie combinait les amortis, les vols de buts et les squeezes pour marquer des points et remporter des victoires. Elle fonctionnait si bien que l’équipe a même gagné un match 3 à 1 sans jamais vraiment frapper la balle.
Le plus récent timbre de Postes Canada raconte l’histoire du jeu astucieux et des Asahi, qui ont contribué à faire tomber les barrières raciales grâce au sport. Il s’agit d’un exemple du ganbaré, c’est-à-dire la détermination à vaincre le racisme et la discrimination sans représailles, grâce à l’esprit sportif.
Alors que les partisans et les adversaires blancs chahutaient et insultaient les joueurs des Asahi, ces derniers laissaient leurs actions sur le terrain parler pour eux.
Menée par des joueurs légendaires comme Junji Ito, le roi du coup amorti, Roy Yamamura et Tom Matoba, l’équipe a remporté le championnat de la Terminal League en 1926. Elle a gagné quatre autres titres jusqu’en 1933, puis cinq championnats consécutifs du Pacific Northwest, de 1937 à 1941.
Les Vancouver Asahi étaient une source de grande fierté pour les Canadiens d’origine japonaise, et attiraient le plus grand nombre de spectateurs sur la côte ouest. Les recrues pleines d’espoir venaient de toutes les villes de la vallée du Fraser, et porter l’uniforme des Asahi était le rêve de presque tous les garçons nippo-canadiens, notamment Kaye Kaminishi.
Ce dernier a grandi dans une maison de chambres gérée par sa mère. Comme l’habitation était située en face du Powell Street Grounds, il allait voir tous les matchs des Asahi. Il a d’abord joué dans une ligue confessionnelle avant de se joindre à la Japanese League, puis aux Asahi en 1939, dont il était le plus jeune membre.
L’équipe de baseball des Vancouver Asahi était une source de fierté
Les Canadiens d’origine japonaise adoraient le baseball, qui occupait une place importante dans la culture nord-américaine dont ils étaient largement exclus. De plus, ce sport était abordable pour les familles de la classe ouvrière et représentait leur tissu social.
Les jours de match, les commerces étaient fermés et les écoles laissaient partir les enfants plus tôt. Et le dimanche, l’église était vide. Les spectateurs s’installaient dans les gradins et le long des rues autour du parc Oppenheimer.
Cette tradition a pris fin lorsque le Japon a attaqué Pearl Harbor en décembre 1941. Le Canada a déclaré la guerre au Japon et a interné plus de 20 000 personnes d’ascendance japonaise dans des camps en Colombie-Britannique. Les membres des Vancouver Asahi n’ont jamais pu rejouer ensemble.
Au cours des 24 à 48 heures qu’ils avaient pour récupérer ce qu’ils pouvaient emporter dans quelques sacs, les joueurs ont pris leurs gants et leurs uniformes de baseball.
Les joueurs des Vancouver Asahi occupent une place d’honneur au sein de l’histoire nippo-canadienne
Depuis 2003, l’équipe des Asahi a été intronisée au British Columbia Sports Hall of Fame (2005), une plaque lui a été consacrée au parc Oppenheimer (2008), plusieurs livres et films au sujet de l’équipe ont été produits, et une Minute du patrimoine a été diffusée par Historica Canada (2019).
Pendant l’événement organisé au Temple de la renommée du baseball canadien, Kiyoshi Suga, une étoile des Asahi dans les années 1930, a déclaré que l’acceptation de la foule et l’intronisation de l’équipe étaient « la reconnaissance ultime après tout ce qui s’est passé ».
Dans un autre discours livré lors de la cérémonie, M. Kutsukake a décrit le Canada comme « le meilleur pays au monde où vivre ».
À l’occasion du lancement au Musée national Nikkei le 24 avril 2019, 250 personnes étaient présentes pour accueillir le dernier joueur des Asahi et célébrer son équipe. En le voyant plaisanter avec les garçons de l’Asahi Baseball Association, une organisation qui s’inspire de l’équipe initiale, on ne pouvait que se rappeler les paroles de l’historien Greg Robinson, qui a décrit l’internement comme une tragédie qui finit bien.
Pour Kaye Kaminishi, l’histoire de son équipe en a été une à l’épreuve du temps.
Un timbre met en vedette les Asahi
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