Trois soldats ont vécu sur la rue Pine, à Winnipeg, à différentes époques. Ils ont servi dans la même guerre. Plus remarquable encore, chacun d’eux a reçu la prestigieuse Croix de Victoria.
Décernée à moins de 100 Canadiens depuis 1856, la Croix de Victoria est la plus haute distinction britannique pour acte de bravoure au combat. Cette décoration est octroyée « pour un acte de bravoure remarquable, pour un acte de vaillance ou d’abnégation audacieux ou extraordinaire, ou pour un dévouement extrême à son devoir en présence de l’ennemi », selon Anciens Combattants Canada.
En 1925, la rue Pine est renommée à la mémoire des trois soldats. Bien que rien ne prouve que les hommes se connaissaient, la rue où ils ont vécu rend hommage à leur courage et à leur sacrifice durant la Première Guerre mondiale. C’est Valour Road (chemin de la bravoure).
Lionel (Leo) Clarke, V.C.
Leo Clarke (1892-1916) s’installe avec sa famille sur la rue Pine, à Winnipeg, alors qu’il est adolescent. Travaillant dans le Nord comme arpenteur ferroviaire avant la Première Guerre mondiale, il retourne chez lui pour s’enrôler en février 1915.
Au cours de la bataille de la Somme en 1916, Leo Clarke et une petite section du 2e Bataillon d’infanterie canadienne doivent dégager une tranchée allemande près de la ville de Pozières, en France. Tous les hommes, sauf le caporal, sont tués ou gravement blessés durant l’opération. Malgré une blessure à la jambe infligée par la baïonnette d’un ennemi, il parvient à repousser les Allemands.
« Dernier debout, il a défendu cette position contre la force allemande, qui a riposté vivement, et est parvenu à repousser l’ennemi grâce à sa détermination et sa ténacité. Cela a alors empêché les Allemands de dépasser la position et de récupérer la tranchée », explique Eric Fernberg, spécialiste de collection au Musée canadien de la guerre.
Promu sergent, il meurt le mois suivant à la suite de blessures causées par l’explosion d’un obus ennemi. Sa Croix de Victoria est remise à titre posthume à son père, Henry Clarke.
Robert Shankland, V.C., DCM
Robert Shankland (1887-1968) immigre au Canada en 1911 et s’installe sur la rue Pine quelques années plus tard. En décembre 1914, il s’enrôle dans le 43e Bataillon d’infanterie canadienne. Durant la bataille de Passchendaele en 1917, son peloton et des hommes d’autres compagnies parviennent à gagner une partie de l’éperon de Bellevue, un endroit stratégique.
Sa force largement réduite, Robert Shankland pousse les survivants à mener une contre-attaque intense et maintient la position. Il se fraye ensuite un chemin dans la boue jusqu’au quartier général du bataillon pour rapporter la position des Allemands.
Le roi George V lui remet la Croix de Victoria en octobre 1918. Deux ans plus tôt, il reçoit une Médaille de conduite distinguée pour avoir dirigé des brancardiers sous un feu nourri. Robert Shankland assiste au changement de nom de la rue Pine en 1925 et sert également pendant la Seconde Guerre mondiale.
Bien que le soldat chérit sa Croix de Victoria et ce qu’elle représente, « il n’en parlait pas vraiment. Pour nous, il était simplement notre grand-père », raconte son petit-fils, Mark Cameron Shankland. Selon lui, le nouveau timbre est une occasion de perpétuer des histoires comme la sienne. « J’ai été étonné de constater à quel point ma fille était intéressée à en apprendre plus sur son arrière-grand-père et à en parler aux élèves de sa classe. »
Frederick William Hall, V.C.
Frederick Hall (1885-1915) immigre au Canada en 1913, où il habite un certain temps sur la rue Pine et où il travaille comme commis à l’expédition. Après la déclaration de guerre, il s’enrôle dans le 8e Bataillon d’infanterie canadienne et atteint rapidement le rang de sergent-major de compagnie.
En 1915, au cours de la deuxième bataille d’Ypres en Belgique, Frederick Hall, qui avait secouru le même jour deux autres soldats blessés, rampe hors de sa tranchée accompagné de deux hommes pour aller secourir, à moins de 15 mètres, un soldat blessé. Les tirs très intenses des Allemands blessent les deux autres sauveteurs et font reculer Frederick Hall. Déterminé, ce dernier se rend jusqu’au soldat à la deuxième tentative et, alors qu’il le soulève pour le ramener en lieu sûr, lui et l’homme sont atteints mortellement. Sa Croix de Victoria est envoyée à titre posthume à sa mère, Mary Hall, avec une lettre du roi George V.
Henry Hall, le frère du sergent-major de compagnie, sert également durant la guerre et apprend que ce dernier est mort au combat. « Il a été bouleversé par la mort de son frère et est très fier qu’il ait reçu la Croix de Victoria », explique Doug Cargo, le petit-neveu de Frederick Hall.
Doug Cargo raconte qu’il se rend chaque année au Monument commémoratif de guerre du Canada à l’occasion du jour du Souvenir pour se recueillir. « Je me fais un devoir d’aller sur la Tombe du Soldat inconnu. Les chances que ce soit celle de mon oncle sont minces, mais ce n’est pas impossible. »
Un hommage aux braves qui servent
Les héros de Valour Road étaient des Canadiens ordinaires. Ils ont surmonté les difficultés et la peur, tout en faisant preuve d’un courage et d’un don de soi extraordinaires. Ils représentent le sacrifice consenti durant la Première Guerre mondiale – un conflit horrible qui a coûté la vie à environ 61 000 Canadiens – et le dévouement de tous les anciens combattants et membres des Forces canadiennes.
« Valour Road est spéciale pour moi, car c’est l’histoire d’une communauté qui rend hommage aux siens, explique M. Fernberg. Grâce à elle, nous n’oublierons jamais. »
Un nouveau timbre rend hommage à trois récipiendaires de la Croix de Victoria qui ont tous vécu sur la rue Pine à Winnipeg
En vente maintenant