L’avenir de la publicité numérique: technologie, vie privée, liens de confiance

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Au cours des dernières décennies, la publicité numérique a fait d’énormes progrès, notamment avec l’avènement de la programmatique. Mais les marques et les agences font aujourd’hui face à des défis associés à la connexion des outils marketing aux plateformes de données, à la mesure omnicanal, à la sécurité de la marque, à la fraude ainsi qu’à la réduction des émissions de carbone.

La principale raison qui freine la capacité de l’industrie à répondre à ces enjeux est sa difficulté à suivre le rythme effréné du développement technologique et à adopter les nouveaux outils qui s’offrent à elle.

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Une femme se tient debout devant un mur d’écrans affichant des images, des vidéos, et des publications sociales.

Un secteur en pleine transformation

Les entreprises ont toujours su répondre aux défis en investissant dans l’innovation, la certification et la formation. Cependant, au cours des dernières années, les dépenses technologiques semblent avoir atteint leur paroxysme, signe possible de redondance et d’obsolescence.

Les actionnaires se demandent maintenant si cette frénésie technologique génère de la valeur ou si elle ne fait que miner les budgets. Après avoir dû investir au cours des deux dernières années dans la mise en conformité de leurs plateformes aux règlements canadiens et internationaux de protection des renseignements personnels – sans aucun avantage en retour, si ce n’est l’évitement de sanctions –, les marques doivent maintenant composer avec trois nouvelles réalités qui exigent des stratégies distinctes :

  1. Les organismes de réglementation renforcent les lois pour protéger les gens de la surveillance non contrôlée des entreprises.
  2. Les plateformes technologiques sécurisent leurs données.
  3. La clientèle fonde ses décisions d’achat sur la confiance.

Longtemps, les annonceurs ont compté sur les plateformes publicitaires pour joindre aisément leur clientèle. Séduites par la capacité des moteurs de recherche et de la programmatique à générer des ventes, les entreprises y ont investi massivement, au point de créer un marché publicitaire de 18 milliards de dollars, au détriment de la télévision.

Et alors que des marques développaient leurs propres plateformes publicitaires, des interfaces libre-service ont permis aux petites et moyennes entreprises – 98 % de l’économie canadienne – de profiter elles aussi de ces nouvelles solutions, sans avoir à investir dans d’onéreuses infrastructures technologiques. On précise son budget et hop! le tour est joué; les outils s’occupent du reste.

Consentement et conformité

Mais alors que les pratiques entourant la publicité en ligne sont revues de fond en comble, l’industrie publicitaire canadienne fait face à un défi jamais vu auparavant.

Ainsi, avec le projet de loi C-27 sur la protection de la vie privée, les marques devront ajouter un mécanisme de consentement à l’ensemble des points de contact recueillant des données pour fin de ciblage, y compris en magasin. Cette exigence de conformité et de reddition de comptes implique une infrastructure technique spécialisée.

Depuis l’entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données en Europe en 2018, le secteur suit de près le développement de plateformes de gestion du consentement. Ces outils qui permettent de se connecter à l’ensemble de la chaîne logistique de la publicité et de respecter les préférences des gens en matière de données sont devenus des incontournables.

Depuis 2023, grâce à son cadre de travail primé, IAB Canada aide les développeurs de plateformes de gestion du consentement et les fournisseurs de technologies publicitaires à se conformer aux lois canadiennes sur la protection des renseignements personnels, notamment à la loi 25 du Québec, qui a précédé la loi fédérale.

Au-delà des cookies

Ces nouvelles exigences juridiques ont une incidence directe sur l’environnement technologique. Ainsi, le recours aux données tierces provenant des traceurs (les fameux cookies) a constamment diminué depuis 2019 et avec Google Chrome qui compte éliminer la capacité d’adressage basée sur les traceurs d’ici la fin de l’année, le phénomène ira en s’accélérant. Malgré un renversement récent sur ce plan, le virage est bien amorcé, et déjà de nouvelles solutions d’identification s’offrent à nous.

Conformément aux lois internationales sur la protection des renseignements personnels, les annonceurs sont tenus de conserver soigneusement leurs données client. Mais une fois anonymisées dans des « salles blanches », ces données peuvent à nouveau être utilisées dans un contexte de ciblage publicitaire. Les marques sont donc à l’affût de ces approches de personnalisation à grande échelle qui compensent, en partie, des capacités perdues comme le reciblage et le plafonnement de la fréquence. L’IAB Tech Lab s’est concentré sur les normes d’interopérabilité de ces solutions afin d’atténuer le risque de fragmentation dans un marché de l’identité déjà saturé.

Ces nouvelles approches témoignent de l’importance accrue des données internes et donc de la nécessité d’établir des liens de confiance avec la clientèle pour les obtenir. Mais les efforts valent la peine, puisqu’en se rapprochant de leurs publics, les marques renforcent la fidélisation pendant que les éditeurs Web améliorent l’expérience en se concentrant sur la création de contenu engageant et de communautés.

La silhouette d’un homme à travers l’écran translucide d’un ordi affichant des icônes divers

De nouvelles approches connectées

Suite au retrait des traceurs et alors que la sécurité de la marque en ligne demeure une préoccupation, de nouvelles façons de joindre publicitairement les gens s’offrent aux marques, au-delà de la publicité numérique traditionnelle. Les réseaux média de détaillants et la télévision connectée attirent particulièrement l’attention, ces deux approches profitant des relations symbiotiques entre la marque et le média.

La télévision connectée s’avère un terrain de jeu très attrayant, grâce à ses possibilités de personnalisation et de microciblage dans un contexte créatif télévisuel. Et avec des offres comme Roku, Samsung, LG et Prime et des services offerts par des télédiffuseurs canadiens tels que Rogers, Corus et Bell, cette solution témoigne déjà d’un potentiel de portée fort intéressant.

Cependant, là aussi, de nouveaux défis se posent, notamment en ce qui a trait à l’uniformisation des mesures, dont celles sur la portée réelle. La fragmentation des données de mesure multiplateformes n’est pas chose neuve, mais le kit de développement logiciel Open Measurement, développé par l’IAB Tech Lab, permet d’y remédier. En offrant un cadre universel de mesure des données principales comme le type d’appareil utilisé, la durée de visionnement et les moments où la télé est activée ou pas, il permet des mesures normalisées tout en assurant transparence et conformité.

De leur côté, les réseaux de détaillants ouvrent les portes de leurs propriétés média (site Web, applications, affichage en magasin), donnant accès à une clientèle qui s’apprête à consommer. Les marques profitent ainsi des données client du détaillant, mais sur une base anonyme respectant les renseignements personnels. Selon une étude menée en 2024 par eMarketer et IAB Canada (en anglais seulement), ce nouveau marché combinant la vente au détail, le média et les données devrait dépasser les 5 milliards de dollars d’ici 2027.

Une IA de plus en plus présente

Grâce à ses fortes capacités de traitement d’information, l’IA se présente comme la nouvelle pierre d’assise technologique de l’infrastructure publicitaire. Grâce à la modélisation du mix média, elle permet de mieux mesurer l’apport respectif des points de contact d’une marque sur ses résultats, pendant que l’IA générative rend possibles des communications personnalisées par une gestion dynamique des actifs créatifs.

Environ 80 % des membres d’IAB Canada utilisent déjà l’IA, tant pour améliorer le flux de travail que pour les assister dans le développement créatif. Bien que les préoccupations au sujet de l’impact négatif de l’IA sur les emplois persistent, la plupart des acteurs de l’industrie sont convaincus que le contact humain demeure essentiel.

Et demain?

Quelques constats se dégagent quant à l’avenir de la publicité numérique.

D’abord, que ce soit entre les marques et la clientèle ou entre les diffuseurs et leur public, les liens directs sont devenus essentiels. Dans ce nouveau contexte de consentement explicite obligatoire, la confiance n’a jamais été aussi importante alors que chaque refus a des conséquences néfastes durables sur la portée.

Ensuite, la priorité doit aller à la confidentialité. Comme le recours à des tactiques par marché causera inévitablement une résistance réglementaire, l’avenir de l’industrie passe donc par l’adoption de normes mondiales et de nouvelles façons de joindre la cible. À ce propos, le Canada a l’occasion de tirer son épingle du jeu grâce à des solutions locales novatrices qui tablent sur l’interopérabilité mondiale.

Et enfin, nous devons réfléchir à notre rôle dans ce secteur en évolution constante. Au cours des prochaines années, les service marketing devront justifier leur présence dans l’écosystème. Il est donc essentiel d’utiliser dès maintenant les outils à notre disposition pour élever notre utilité et renforcer les liens entre les marques et les gens, notre raison d’être.

Nous vivons un moment à la fois excitant et décisif. Ouvrons les portes à un talent diversifié et exploitons ensemble l’incroyable potentiel du marketing numérique pour renforcer la position de l’économie canadienne sur la scène mondiale.

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Sonia Carreno
La longue expérience du numérique de Sonia Carreno, présidente d’IAB Canada, couvre toutes les disciplines de la publicité numérique et lui a valu de nombreux prix. En 2021, elle a été intronisée au Marketing, Advertising, PR and Communications Hall of Fame du Canada pour son apport à l’industrie canadienne du marketing et de la publicité dans sa transition à l’ère numérique.Lire d’autres textes de Sonia Carreno